Les modèlesLa situation climatique à venir va très probablement être totalement inédite depuis que l’homme a démarré son existence terrestre. Comme il est alors impossible de se tourner vers le passé récent pour avoir une idée de ce qui peut se passer plus tard, les seuls outils dont la communauté scientifique dispose pour tenter de savoir ce qui peut se passer à l’avenir sont des modèles climatiques. Show
Un modèle climatique n’est rien d’autre (nos amis scientifiques trouveront peut-être que ce n’est déjà pas si mal!) qu’un logiciel très complexe, dont le but est de reproduire aussi fidèlement que possible le comportement du climat terrestre. Il s’agit donc d’un gros programme pour ordinateur, construit de la manière suivante :
Evolution de la résolution (ou du maillage, c’est pareil) des modèles climatiques globaux au cours du temps. Avant le premier rapport d’évaluation du GIEC (FAR pour First Assessment Report), c’est-à-dire dans la décennie 1980, la taille de la maille était typiquement de 500 km de côté. A cette époque, la France ne comptait que pour 4 mailles dans un modèle ! C’était l’ordre de grandeur dans tous les modèles globaux ; certains modèles dits régionaux utilisaient des mailles plus petites – de l’ordre de 50 km – au-dessus d’une région particulière mais alors les mailles pour le reste du monde pouvaient mesurer jusqu’à 1000 km de côté. Au moment du 2è rapport d’évaluation (SAR pour Second Assessment Report ; 1995) la taille de la maille avait été divisée par 2, et 10 ans plus tard (au moment de l’AR4, pour 4th Assessment Report, publié en 2007) elle a encore été divisée par 2 par rapport à la décennie 1980. Source GIEC, 2007
Schéma d’ensemble d’un modèle particulier. Les intitulés (en Anglais, hélas !) indiquent les éléments et interactions pris en compte dans le modèle. Source: Hadley Centre.
L’un des avantages de ces modèles est qu’ils peuvent facilement permettre une comparaison « virtuelle » de deux évolutions du monde (ce qui est impossible dans la réalité, puisque l’histoire ne s’écrit qu’une fois). Il est ainsi possible de spéculer sur ce qui se passe « si » (« si » les hommes émettent des gaz à effet de serre, certes, mais les mêmes modèles servent aussi à reconstituer les climats de la préhistoire ou même à comprendre ce qui se passe sur Mars !). Pour prendre en compte une perturbation humaine qui évolue au cours du temps, par exemple l’augmentation de la teneur en gaz à effet de serre, il suffit de rajouter une équation dans la liste, ou d’imposer une valeur donnée à un paramètre donné. La modélisation est une discipline qui ne date pas d’hier : les premiers modèles – purement atmosphériques – datent des années 60 (le premier modèle atmosphérique date même de 1950, et a été testé sur le premier ordinateur existant, l’ENIAC). Ce qui a permis un essor rapide de la discipline est plus l’augmentation de la puissance informatique disponible (et l’avènement des satellites, qui ont fourni pléthore de données d’observation qui ont pu être confrontées aux sorties de modélisation) que des percées majeures en physique, physique qui était déjà assez bien connue il y a quelques dizaines d’années (avec comme conséquence que les premières « alertes » sur le réchauffement climatique datent de la fin des années 1960). Par exemple, le temps de calcul pour simuler un mois d’évolution a été divisé par plus de 100 entre 1980 et nos jours ! Plus la puissance informatique augmente, et plus on peut utiliser des mailles de petite taille. Plus on travaille sur des périodes courtes, et plus on peut aussi diminuer la maille (ce qui augmente la précision des prévisions) : les météorologues, qui ne s’intéressent pas au climat qu’il y aura dans quelques siècles, mais à celui qu’il y aura demain ou dans 3 jours, travaillent sur des modèles atmosphériques identiques à la partie « atmosphère » des modèles de climat globaux, mais avec des mailles de quelques kilomètres de côté seulement. Désignation des modèlesSelon la manière dont ils sont construits et ce qu’il prennent en compte, les modèles sont désignés avec des sigles différents. En voici quelques uns :
Il arrive enfin que la lettre R s’intercale quelque part à la place du G : il s’agit alors de modèles régionaux. Combien de modèles ?Il existe actuellement une quinzaine de modèles globaux de par le monde, développés par autant d’équipes pluridisciplinaires (un grand pays en a rarement plus de 2 ou 3), qui regroupent environ 2.000 scientifiques de disciplines variées . Toutefois le nombre total de scientifiques de disciplines différentes qui concourent à la construction ou à l’alimentation des modèles est bien supérieur, au moins d’un facteur 10 : pour « savoir quoi mettre » dans ces modèles il faut faire appel à des travaux déjà effectués par des physiciens, des chimistes, des biologistes, des géologues, des océanographes, des aérologues, des glaciologues, des énergéticiens, des démographes… En France, l’un des pôles de modélisation et d’étude du climat est l’Institut Pierre Simon Laplace (IPSL), rassemblant :
Que prennent-ils en compte?Les lois de la physique restent bien entendu les mêmes partout et tout le temps, mais ces modèles sont quand même assez différents les uns des autres : les uns prennent en compte les effets des nuages comme ceci, les autres comme cela, les uns prennent en compte certains phénomènes de la biosphère (la biosphère est l’ensemble des êtres vivants), les autres pas, etc. Ce qui différencie le plus les modèles les uns des autres, cependant, est surtout la date à laquelle ils ont été terminés. Evolution du degré de complexité des modèles depuis leurs débuts. Dans la décennie 1970, les modèles étaient purement atmosphériques, avec prise en compte des précipitations et de la composition de l’atmosphère. Dans les années 1980 on a vu arriver l’occupation de la surface, les nuages, et la glace de mer (non couplée). Au moment du premier rapport d’évaluation du GIEC (FAR pour First Assessment Report), l’océan a été rajouté, mais sans représentation de la circulation à grande échelle. Au moment du 2è rapport d’évaluation (SAR pour Second Assessment Report ; 1995) les modèles ont « accueilli » les aérosols, le volcanisme et la circulation horizontale de l’océan. Au moment du 3è rapport d’évaluation (TAR pour Third Assessment Report ; 2001) ces outils représentaient aussi la circulation océanique profonde, début du cycle du carbone, les rivières. Enfin les modèles utilisés pour l’AR4 (pour 4th Assessment Report, publié en 2007) comprennent pour certains la chimie atmosphérique (c’est-à-dire les processus qui permettent de représenter l’augmentation – ou la diminution – d’une espèce chimique A dans l’atmosphère à partir de la variation d’espèces B + C), et une végétation réagissant de manière dynamique aux conditions climatiques régionales. Ce qui est remarquable, dans tout cela, est que cette complexification progressive des outils utilisés n’a pas invalidé les conclusions des modèles des années 1970, à savoir que nos émissions allaient modifier le climat, en augmentant notamment la température moyenne de quelques degrés si nous doublons la concentration du CO2 en un siècle. Source GIEC, 2007 (4è rapport d’évaluation). Si nous regardons un peu plus dans le détail, voici les principaux items pris en compte dans les modèles utilisés aujourd’hui. Attention ! « Pris en compte » ne veut pas dire que tout est connu sur le point considéré, mais simplement que « on en parle » dans le modèle :
Comme on l’a vu, il n’y a pas un seul mais plusieurs gaz à effet de serre. Ces gaz ne sont pas toujours pris en compte de manière indépendante dans les modèles : on commence par faire la « somme » des différents gaz émis, en les pondérant par leurs pouvoirs de réchauffement respectifs, et c’est cette « somme » que l’on utilise pour représenter les émissions de tous les gaz à effet de serre. Une telle simplification, si elle est appliquée, empêche d’étudier facilement par les résultats de la modélisation les effets d’un début de réchauffement sur les émissions « naturelles » de gaz à effet de serre pris un par un. C’est notamment le cas pour le méthane, dont la vitesse d’élimination dans l’atmosphère dépend significativement de sa concentration.
Quelles sont leurs faiblesses?Les trois grandes sources d’incertitude des modèles sont les suivantes :
Mais il ne faudrait pas déduire du fait qu’il reste des zones d’ombres que l’on peut ignorer les résultats, ce qui serait jeter le bébé avec l’eau du bain ! En outre, ces outils sont en perpétuelle évolution, et donc en perpétuelle amélioration. Premières conclusions des modèlesUn point essentiel est que, même si ils sont construits de manière différente, même si les résultats chiffrés auxquels ils parviennent ne sont pas rigoureusement identiques, tous ces modèles aboutissent à des conclusions de même nature : l’homme modifie le climat dans le sens d’un réchauffement global de la planète. En outre ces modèles indiquent aussi que plus les émissions de gaz à effet de serre sont élevées, et plus le système réagit de manière forte. La température moyenne de la planète va augmenter. Selon le scénario d’émission pris en compte, il est question de 1°C à 6 °C entre 2000 et 2100. Augmentation de température moyenne de l’air au niveau du sol (ce que l’on appelle
« la température moyenne de la Terre ») en fonction des années (le 0 correspond à l’an 2000), à raison d’une courbe par modèle. Tous les modèles ont été alimentés avec la même hypothèse : une concentration en CO2 qui augmente de 1% par an (ce qui est à peu près le rythme d’évolution au début du 21è siècle). Sources : PCMDI/IPSL
Evolution
des précipitations moyennes annuelles par rapport à l’an 2000 (0 des ordonnées) à raison d’une courbe par modèle. Tous les modèles partent de la même hypothèse d’une concentration en CO2 qui augmente de 1% par an. Lorsqu’une courbe franchit la valeur 0,05, par exemple, cela signifie qu’à ce moment là les précipitations moyennes à la surface du globe augmentent de 0,05 mm d’eau par jour, soit un peu plus de 18 mm d’eau par an, soit encore 3,5% des précipitations actuelles (520 mm d’eau par an en moyenne). Toutefois ce surplus de précipitations ne serait pas réparti de manière égale partout : les modèles prévoient de grandes disparités en fonction de la latitude. Sources: PCMDI/IPSL Répartition du surplus (ou du déficit) de précipitations en fonction de la latitude au moment ou la concentration de CO2 dans l’atmosphère aura doublé (entre 2060 et 2080 ans selon les émissions futures), a raison d’une courbe par modèle. L’axe vertical est gradué en mm d’eau par jour, et donne donc la différence de la moyenne journalière de précipitations (pour la terre entière) entre la situation future de la simulation et aujourd’hui. On voit par exemple que à la latitude 60° Nord (Nord de l’Ecosse, Sud de la Norvège, où il pleut déjà pas mal, il pleuvrait encore plus (70 mm d’eau par an en plus en moyenne) alors que vers 30°N (Californie, Sahara, Mongolie, bref des endroits peu arrosés) il pleuvrait autant ou plutôt moins, et que vers 30 °S (Afrique du Sud, Australie, Argentine) il pleuvrait plutôt un peu moins. Sources: PCMDI/IPSL
Augmentation de température en fonction de la latitude au moment ou la concentration de CO2 dans l’atmosphère aura doublé (vers 2060 à 2080 ans en « prolongation tendancielle ») à raison d’une courbe par modèle. On voit que les glaces du Pôle Nord (90° de latitude Nord, à gauche sur la figure) sont les premières concernées : à ce moment là, l’augmentation moyenne de température au Pôle Nord pourrait aller jusqu’à 8° C ! Sources: PCMDI/IPSL Les 3 différences mentionnées ci-dessus proviennent peuvent être expliquées avec la même raison: l’effet de serre correspond à l’interception du rayonnement terrestre, lequel ne disparaît pas la nuit ou l’hiver. Cet effet est donc proportionnellement plus important partout où il n’y a pas de soleil. En effet, en l’absence de notre astre du jour, l’effet direct du chauffage solaire n’existe plus (ou est réduit en hiver), pendant que l’effet indirect de chauffage du sol provenant de l’effet de serre décroit moins vite. De ce fait l’effet relatif de son augmentation (de l’effet de serre) est plus sensible quand il n’y a pas de soleil (en hiver et la nuit). Un autre processus va dans le même sens : quand il n’y a pas de soleil, l’air est plus froid, donc plus sec, et l’effet de serre « naturel » du à la vapeur d’eau est plus faible. En conséquence, l’effet de serre additionnel du à l’augmentation du CO2 dans l’air (lequel est réparti de manière homogène et indépendant de la température) est proportionnellement plus élevé là où la température est basse (à l’Equateur, où l’air est déjà saturé en vapeur d’eau, l’augmentation de la concentration en CO2 a un effet bien plus faible sur l’effet de serre qu’aux pôles). Cela explique aussi pour partie de l’augmentation de température plus marquée près des pôles. sur les continents (par opposition aux océans), car l’inertie thermique des grandes masses d’eau est très supérieure à celle du sol; un facteur 1,5 à 2 étant parfaitement possible entre l’augmentation globale et celle au-dessus des continents de l’hémisphère Nord. Cela signifie que pour 3 °C d’augmentation de la température moyenne, qui correspond à un scénario d’émission qui reste compatible avec les ressources fossiles inventoriées, nous pourrions avoir près de 5° C d’augmentation moyenne au-dessus des continents. Et que dire quand on sait que la température moyenne pourrait monter de 8 à 9 °C d’ici à 2 siècles! Quelles sont les avantages du climat ?L'élévation de la température et de la concentration atmosphérique en CO2 favorise le métabolisme des végétaux et leur photosynthèse. Si les autres ressources nécessaires à la croissance végétale sont présentes, la productivité végétale devrait augmenter.
Quelle est l'importance de l'étude du climat ?5L'étude climatique permet une caractérisation des phénomènes climatiques, qu'ils soient connus ou non, voire pressentis avant cet exercice, par leur localisation, leurs amplitudes, leur durée ou leur fréquence.
Comment les scientifiques peuvent reconstituer les climats du passé ?Pour reconstituer le climat du passé, il faut étudier les paramètres climatiques comme les températures, les mouvements des fluides… à partir de plusieurs indices, notamment les fossiles, afin de savoir comment la chaleur était transportée.
Quelle est l'importance de la végétation pour le climat ?C'est parce que les forêts jouent un rôle majeur dans la régulation du climat : Elles améliorent la quantité d'eau disponible et sa qualité. Elle permettent de réduire l'érosion des sols et de créer des microclimats qui préservent, et parfois optimisent la productivité agricole.
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