Comment se soigner quand on a le covid

Alors que l’arrivée des vaccins contre la Covid-19 suscite un élan d’espoir dans la lutte contre la pandémie, aucun traitement n’a à ce jour encore été trouvé pour combattre l’infection. Dès lors, comment soigner la maladie ?

Le Pr Jean-Jacques Mourad, chef du service de Médecine interne à l’hôpital Paris Saint-Joseph - Groupe Hospitalier Paris Saint-Joseph, nous explique comment sont pris en charge les malades. 

Dans la grande majorité des cas (80%), une infection à la Covid-19 s’avère bénigne. Les patients présentant des symptômes sans gravité doivent s’isoler et rester chez eux au moins 7 jours, afin de ne pas contaminer d’autres personnes et saturer les capacités d’hospitalisation des établissements de santé.

Bien qu’il n’existe à ce jour aucun traitement spécifique contre la maladie, il est toutefois possible d’en limiter les symptômes, comme les maux de gorge et la fièvre. Pour cela, vous pouvez prendre du paracétamol, en respectant bien les posologies. Soit pas plus de 1 gramme, 3 fois par jour (généralement au moment des repas).

"Ce que l’on recommande aujourd’hui à la maison c’est principalement de lutter contre la fièvre et la diarrhée, avec les moyens habituels, c’est-à-dire les antalgiques de type paracétamol et des antidiarrhéïques", explique le professeur.

Il est également important de surveiller votre température. On recommande de la prendre 2 fois par jour, matin et soir. La fièvre est variable chez les patients atteints de la Covid-19, elle peut être très légère au début, puis monter fortement quelques jours après, d’où l’intérêt de la surveiller régulièrement, afin d’anticiper.

Pensez à vous reposer pour aider votre corps à récupérer et ne pratiquez plus d'activité physique pendant toute la durée de votre infection. Avec le virus, cela peut provoquer une réaction inflammatoire du myocarde et des troubles du rythme. De plus, cela vous essoufflera et contribuera à votre sensation d’oppression. Vous pouvez également développer des difficultés respiratoires si vous forcez trop sur vos poumons.

"Veillez à bien vous hydrater avec de l'eau afin d'éviter une déshydratation liée à la fièvre et des courbatures, ajoute le Pr Mourad. Si votre état s'aggrave, n'hésitez pas à consulter en urgence."

Petit conseil de la rédaction : pour donner un coup de pouce à votre immunité, invitez des fruits et légumes riches en vitamine C ( comme le kiwi, l’orange, les brocolis, le poivron...) et en zinc (le foie de veau, les céréales complètes…) dans votre assiette. Vous pouvez aussi miser sur des plantes qui boostent l'immunité comme l’astragale ou l’échinacée. Les méthodes naturelles, comme les tisanes, le miel et le citron pressé, utilisés pour aider à combattre le rhume et autres infections hivernales, sont conseillés. S’ils ne guérissent pas de la Covid-19, ils aident à en soulager les symptômes, notamment le mal de gorge.

Quels médicaments éviter en cas d'infection à la Covid-19 ?

Le lavage des cavités nasales est à éviter, car il risquerait d’envoyer le virus de la muqueuse nasale aux poumons soulignait déjà en mars dernier la Direction Générale de la Santé.

Le Haut Conseil de la Santé Publique rappelle également que les anti inflammatoires non stéroïdiens sont proscrits, en raison du risque inflammatoire auquel ils exposent. "La prise d’anti-inflammatoires (tels que l’Ibuprofène, l’Advil ou l’Aspirine) pourrait être un facteur d’aggravation de la Covid-19. L’information a été largement relayée par le ministère auprès des citoyens comme des professionnels de santé. Tout citoyen déjà sous anti-inflammatoires ou qui aurait le moindre doute vis-à-vis d’un traitement habituel doit consulter son médecin et peut aussi consulter le site SynapseMed ou à en télécharger l’application pour vérifier que ses médicaments ne sont pas suspects d’aggraver la Covid-19."

Même recommandation en ce qui concerne les corticoïdes. Ceux-ci n’ont pas montré de bénéfice lors d’infections virales, y compris à d’autres coronavirus, ils sont donc à éviter, sauf si prescrits pour une autre indication. "Il n’est pas recommandé, chez les gens qui n’ont pas besoin d’oxygène, de prendre de la cortisone, contrairement à ce que beaucoup de médecins généralistes proposent aujourd’hui", ajoute notre expert.

Enfin, la prescription d’antibiotiques est inutile car la Covid-19 est due à un virus et non à une bactérie. La prise d’antibiotiques s’avère donc inutile, sauf en cas d’infection bactérienne associée. 

Formes graves de la Covid-19 : quand faut-il s’inquiéter ?

Le 27 mars 2020, lors de son point sur la situation épidémique, le Directeur général de la santé, Jérôme Salomon, expliquait que "même si c’est assez rare, des personnes qui ont des symptômes bénins peuvent au bout de quelques jours s’aggraver, avec une apparition de difficultés respiratoires".

"L'aggravation clinique de la Covid-19 survient en moyenne entre le 7ème et 11ème jour après les premiers symptômes, remarque le Pr Mourad. Une dyspnée voire une détresse respiratoire sont les premiers signes graves d'une infection à la Covid-19. Elles peuvent avoir différentes causes,  comme :

  • L’atteinte d’un certain pourcentage du poumon par l’infection.
  • Une embolie pulmonaire, c’est-à-dire un caillot se situant dans les artères pulmonaires et empêchant le poumon de faire son travail d’oxygénation du sang, une complication malheureusement très classique de la Covid-19.
  • Une atteinte cardiaque associée.

Il est possible de "vérifier ses capacités à respirer, idéalement avec un saturomètre que l’on place au bout du doigt. Cela ne coûte pas très cher aujourd’hui et est très utile pour surveiller les gens fragiles à la maison. Si la saturation passe en dessous de 93% il faut alors se poser des questions et aller aux Urgences, même si on allait bien jusque-là", recommande-t-il.

L’autre signe important à surveiller est la fatigue générale : "Même si vous n’avez pas de difficulté particulière à respirer, vous pouvez souffrir d’une déshydratation qui vous fatigue, et il vous faudra vous rapprocher de l’hôpital pour vous faire perfuser", explique le Pr Mourad. "Chez les personnes âgées ou appartenant aux populations fragiles, dites à risque, une prise de sang régulière peut être prescrite, afin de regarder s’il y a une inflammation exagérée dans le sang, ou des paramètre de coagulation qui tendent à penser que les malades font une embolie pulmonaire", ajoute-t-il.

Si vous avez beaucoup de mal à respirer, que vous vous sentez essoufflé au moindre effort, si votre toux s'aggrave, que vous vous sentez encombré et que cela vous empêche de bien respirer, contactez immédiatement le SAMU 15.

Quels traitements en cas d’hospitalisation ?

Les formes sévères à graves de la Covid-19 nécessitent parfois une hospitalisation en service traditionnel, soins intensifs ou en réanimation.

"La grande majorité des patients hospitalisés le sont en service traditionnel, note Pr Mourad, car ils ont besoin d’oxygène à des débits plus ou moins important. Plusieurs traitements dont on a démontré correctement qu’ils permettent d’éviter un passage en réanimation peuvent être mis en place en service traditionnel, comme :

  • La cortisone.
  • Des anticoagulants, qui diminuent le risque de thrombose.
  • Des anti-inflammatoires puissants, qui visent à contrecarrer l’emballement du système immunitaire, survenant généralement entre le 8ème et 11ème jour.

Il existe aujourd’hui un stade intermédiaire entre le service traditionnel et la réanimation : les soins intensifs, où l’on a recourt à l’oxygénation non invasive, aussi appelée optiflow. Cette méthode "permet d’oxygéner les malades avec des plus hauts débits qu’en service traditionnel, mais sans avoir recours à l’intubation, comme en réanimation. En effet, l’optiflow est un système d’oxygénation par le nez, où le patient n’est pas placé en coma artificiel", explique le professeur.

"Ce qui a fait la gravité de la maladie lors de la première vague ce sont les complications dues à la réanimation : la ventilation mécanique entraine parfois une surinfection, le coma artificiel des atteintes neurologiques… Tout l’enjeu de la Covid-19 aujourd’hui est de tout faire pour éviter un passage en réanimation et ne plus intuber les malades."

Trois types de traitement peuvent alors être mis en place en soins intensifs :

  • L’optiflow.
  • Des anticoagullants.
  • Des anti-inflammatoires sophistiqués de type biothérapie.

Pour les malades pour qui les soins mis en place en service traditionnel ou en soins intensifs ne suffisent pas, le passage en réanimation est inévitable. "Les débits d’oxygénation sont alors plus élevés et les patients sont ventilés mécaniquement avec des techniques particulières", indique le Pr Mourad.

Lors de la première vague, du 1er mars au 15 juin, 90 061 personnes ont été hospitalisées en France détaille une étude publiée en octobre 2020 par la DREES. Parmi les patients de la cohorte, 55% étaient des hommes, 45% étaient des femmes. La durée médiane d’un séjour à l’hôpital était de 20 jours s’ils sont passés par les soins critiques (comprenant la réanimation et les soins intensifs) et de 8 jours s’ils n’y sont pas passés.

Quatre parcours-types se dégagent sur les 90 jours suivant l’hospitalisation :

  • Les hospitalisations en soins critiques suivies d’un retour à domicile (74 %).
  • Les hospitalisations suivies d’un décès (19 %).
  • Les hospitalisations en soins critiques suivies d’une hospitalisation en soins de suite et de réadaptation (5 %).
  • Les hospitalisations avec un long passage par les soins critiques  suivies ou non d’un décès (2 %).

Et après la maladie ?

Certains malades mettent beaucoup de temps à s’en remettre et présentent toujours des symptômes longtemps après leur infection. Il peut s’agir de symptômes assez variés, comme la toux, la perte du goût et de l’odorat ou encore la fatigue. On parle alors de Covid long.

Selon une étude publiée en ce début d’année 2021 dans la revue scientifique Journal of Internal Medicine, près de 5% des patients ayant perdu leur odorat pendant leur infection à la Covid-19, ne l’ont pas retrouvé six mois après.

Pour les personnes dont l’odorat tarde à revenir, l’anosmie peut être psychologiquement difficile à vivre. En effet, on estime que ces personnes présentent des risques de dépression significativement plus élevés : environ 25% à 30% d’entre elles présentent des symptômes dépressifs, selon le Centre de Recherche en Neurosciences de Lyon.

"Sans odeur, le goût des aliments s'envole. Sans plaisir alimentaire, l'appétit diminue, le plaisir de cuisiner et de manger ensemble se perd", expliquait ainsi la Dre Camille Ferdenzi, chercheuse au CNRS, sur France 3 le 22 octobre 2020. "Autre point important, cela influe sur la détection des dangers : les odeurs sont comme des alarmes pour détecter une fuite de gaz ou un départ de feu. Sans odorat, le risque d'accident domestique augmente", remarquait à juste titre la médecin.

Plusieurs protocoles de rééducation olfactive, ont donc été mis au point pour aider les patients :

  • Le site anosmie.org
  • Le kit d’odeurs de l’ISVV
  • L’application Covidanosmie

D’autres symptômes tels que la fatigue persistante, des maux de têtedifficultés respiratoires (essoufflement, souffle court)manifestations cutanées, une persistance de la toux, mais aussi des troubles cognitifs, complications cardiovasculaires (tachycardie, hypertension), pulmonaires, musculaires (courbatures), neurologiques et rénales ont été signalés par les patients. 

Certains patients passés par la réanimation souffrent également de syndrome de stress post-traumatique.

En France, de nombreux hôpitaux ont mis en place des structures de suivi de patients rentrés chez eux après un séjour en réanimation par exemple. Le 2 juin 2020, l’Académie Nationale de Médecine publiait un communiqué destiné à la prise en charge des patients convalescents afin de recenser tous ceux présentant une persistance de symptômes et de leur prodiguer des conseils. Les médecins de ville sont également sollicités pour assurer le suivi après infection.