Les inconvénients du transport aérien

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Les inconvénients du transport aérien

Les élèves évoquent les effets bénéfiques des transports, mais aussi les nuisances occasionnées.

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Les inconvénients du transport aérien

1Le secteur du transport aérien traverse présentement une des périodes les plus difficiles de son histoire. En effet, les intempéries se succèdent sans répit depuis trois ans dans le ciel de l’industrie du transport aérien. L’éclatement de la bulle technologique, le ralentissement économique, les attentats terroristes du 11 septembre, la guerre en Iraq et finalement l’épidémie du SRAS (syndrome respiratoire aigu sévère) auront eu un effet dévastateur sur la demande de transport aérien à travers le monde. Les compagnies aériennes des 188 pays membres de l’OACI (Organisation de l’aviation civile internationale) ont ainsi enregistré des pertes nettes de 4,2 % en 2001 et de 3,7 % en 2002. Cela se traduit par des pertes d’environ 30 milliards de dollars américains depuis trois ans, soit l’équivalent de tous les profits engrangés depuis le début de l’aviation civile !

2En Europe, des transporteurs au passé prestigieux comme Sabena et Swissair ont dû déclarer forfait après des décennies d’existence. Aux États-Unis, le deuxième transporteur aérien au monde, United Airlines, s’est placé sous la protection de la loi sur les faillites alors que le détenteur du premier rang, American Airlines, s’en est tiré de justesse (pour le moment) et qu’un autre, US Airways, en est sorti récemment avec d’importantes concessions de ses employés et de ses créanciers. Au Canada, la société Canada 3000 a déclaré faillite en novembre 2001 et le transporteur dominant, Air Canada, s’est à son tour placé sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers le 1er avril 2003.

3En dépit de cette conjoncture, force est de constater qu’un segment de l’industrie, celui des transporteurs à tarifs réduits, semble échapper à la loi de la gravité et continue d’afficher des profits et une croissance qui font saliver les transporteurs réguliers traditionnels. Ainsi, l’émule canadienne de Southwest, la compagnie WestJet de Calgary, affiche des profits depuis sa création en 1996. Bref, les problèmes de l’industrie sont-ils liés à une conjoncture passagère ou ne sont-ils pas plutôt les symptômes d’une véritable métamorphose qui serait en cours depuis quelques années déjà ?

4Le présent article aborde les éléments de risque qui caractérisent le secteur du transport aérien en présentant tout d’abord une perspective historique, en évaluant les conséquences des événements récents comme les attentats du 11 septembre et la crise du SRAS, en présentant les phénomènes nouveaux comme la concurrence des transporteurs à tarifs réduits et les changements de comportements des voyageurs d’affaires et enfin en examinant les perspectives d’avenir de ce secteur névralgique pour l’industrie du tourisme mondial.

Le contexte historique

Une industrie cyclique et généralement peu rentable

5L’industrie du transport aérien est tributaire de la situation économique. Elle est donc cyclique et généralement peu rentable, avec quatre à six années de relative rentabilité suivies de trois ou quatre années de pertes qui occasionnent notamment des faillites d’entreprises. Ainsi, peu après la déréglementation du transport aérien aux États-Unis, en 1978, qui entraîna l’avènement de nouveaux transporteurs à tarifs réduits comme People Express, l’industrie entra dans une période difficile causée par le ralentissement économique de 1980 à 1983. Il en résulta la disparition de nombreux transporteurs, dont People Express en qui plusieurs fondaient des espoirs. Une décennie plus tard, de 1990 à 1993, l’économie était de nouveau en récession et, la guerre du Golfe ainsi que la flambée des prix du pétrole aidant, les transporteurs aériens connurent alors une des périodes les plus difficiles de leur histoire avec des pertes de milliards de dollars, soit l’équivalent de tous les profits générés au cours des quarante années précédentes. Des transporteurs aussi prestigieux que Pan American et Eastern Airlines avaient alors mordu la poussière. Cela ne ressemble-t-il pas étrangement à ce qui se passe aujourd’hui ?

6Et pourtant, quelques années plus tard, soit vers la fin des années 1990, certains dirigeants de l’industrie se comportaient comme si la prospérité était là pour durer en commandant de nombreux nouveaux avions (pour répondre à la demande sans cesse grandissante !) et en accordant des augmentations substantielles de salaire à leurs employés. On se trouve donc, au début du vingt-et-unième siècle, avec un excédent de capacité et dans l’obligation de récupérer une partie de l’augmentation des salaires et des autres avantages accordés aux employés quelques années plus tôt, à défaut de quoi des transporteurs comme United Airlines et Air Canada seront acculés à la faillite.

Une croissance qui fléchit

7Historiquement, le trafic aérien a toujours connu un taux de croissance supérieur à celui de l’économie en général. On doit néanmoins constater que ce taux de croissance, mesuré en termes de passagers-kilomètres, diminue au fil des ans comme en fait foi le tableau 1 (Doganis, 2001 : 8). De plus, à la lumière des événements récents, on peut supposer que le taux de croissance de la décennie 1997-2007 sera inférieur à 5 %. Cette tendance masque cependant le fait que les taux de croissance du trafic aérien varient considérablement d’un continent à l’autre. Ainsi, la part de marché du trafic international régulier détenue par les transporteurs de la région Asie de l’Est–Pacifique est passée de 13 % en 1972 à 32 % en 1999 (Doganis, 2001 : 9).

Tableau 1 : Croissance du trafic aérien mondial

Les inconvénients du transport aérien

Source : Doganis, 2001

8D’autres phénomènes se manifestent également. Premièrement, l’importance relative du segment des voyageurs d’affaires diminue régulièrement depuis plusieurs années déjà au profit des déplacements pour autres motifs, dont les loisirs. Il n’en demeure pas moins qu’avec environ le tiers de tous les passagers aux États-Unis, le segment des voyages d’affaires génère près des deux tiers de tous les revenus provenant des passagers des compagnies aériennes américaines (Bender et. al., 1998 : 99).

9On estime maintenant que le marché du transport aérien aurait atteint une phase de maturité en Europe et en Amérique du Nord. Au Canada, le marché intérieur a connu une croissance annuelle moyenne de seulement 1,6 % de 1989 à 1999, suivant de très près l’évolution de la situation économique au pays. Cela n’est pas surprenant car le marché intérieur est celui où l’on trouve la plus importante part de voyageurs d’affaires. Durant cette même période, la véritable croissance est issue du trafic passagers avec les États-Unis (4,2 % en moyenne), stimulé en bonne partie par les accords de « ciel ouvert », et avec les autres pays (5,9 %). Cela confirme la tendance à l’effet que le marché international connaît une croissance supérieure à celle des marchés intérieurs (Transports Canada, 2000).

Les événements récents et leurs conséquences sur le secteur aérien

10Les terribles attentats du 11 septembre 2001 ont provoqué une véritable commotion dans le monde de l’aviation en causant certes, tout d’abord, la fermeture de tout l’espace aérien nord-américain, mais aussi en remettant en question tout ce qui touche la sûreté de ce mode de transport. Du 11 septembre au 4 novembre 2001, le trafic aérien a diminué de 26 % sur l’Atlantique du Nord et de 10 % en Europe. Dans les semaines qui ont suivi les attentats du 11 septembre, les transporteurs aériens ont réduit leur capacité de 20 % en Amérique et sur l’Atlantique du Nord (Alderighi et Cento, 2004 : 97). Il s’ensuivit une vague de mises à pied qui s’est traduite par la perte de 100 000 emplois aux États-Unis, 9 000 chez Air Canada et 1 300 chez Air Transat dans la semaine qui a suivi les attentats. Dans les deux années qui ont suivi, ces événements ont entraîné la perte de plus de 400 000 emplois (IATA dans Archambault, 2003 : 7). Selon l’OACI, l’année 2001 s’est terminée avec un déclin de 2,9 % du trafic de passagers et les deux années suivantes ont été marquées par la stagnation de la demande avec des taux de croissance de 0,4 % en 2002 et de 0,0 % en 2003.

11Depuis ce jour, les voyageurs se demandent s’il est toujours prudent de se déplacer en avion. Il n’est donc pas étonnant que les gouvernements américain et canadien cherchent à convaincre le public voyageur que les mesures exceptionnelles mises en place depuis les attentats sont suffisantes pour décourager tout autre acte de terrorisme. Mais les voyageurs ne sont pas convaincus et les transporteurs ont dû ajuster leur offre de services à la demande en réduisant leur niveau d’activité. En effet, ce qui a changé le plus depuis le 11 septembre, c’est un sentiment de crainte qui affecte toutes les catégories de voyageurs et qui risque d’affecter tous les types de transporteurs aériens. Ainsi, la compagnie Transat a également réagi rapidement dès le 25 septembre 2001 en réduisant ses effectifs de 25 % à 30 % en prévision d’un fort ralentissement de ses activités prévu à l’hiver 2002.

12Devant cette crise, le gouvernement des États-Unis a décidé d’accorder une aide aux transporteurs aériens américains, ce qui a provoqué une réaction en chaîne ailleurs dans le monde. Au Canada, le président d’Air Canada réclamait à l’époque une somme dite équivalente de 2 à 3 milliards de dollars canadiens pour l’ensemble de l’industrie. C’est plutôt un montant de 160 millions de dollars qui fut annoncé par le gouvernement canadien en octobre 2001 à titre de dédommagement pour les compagnies aériennes.

13Au Canada toujours, c’est le 1er avril 2002 que le gouvernement fédéral crée l’Administration canadienne de la sûreté du transport aérien (ACSTA) qui assume notamment la responsabilité juridique directe des contrôles de préembarquement dans 89 aéroports désignés au Canada. Les activités de ce nouvel organisme sont financées par un droit perçu auprès des usagers du transport aérien qui vient s’ajouter aux autres taxes et frais qui alourdissent le prix des billets d’avion et influencent négativement la demande, surtout dans le cas de vols de courte distance.

14Le ralentissement économique et la guerre en Iraq n’ont en rien amélioré la situation des transporteurs aériens qui auraient perdu 25 milliards de dollars américains du 11 septembre 2001 à la fin de 2002, et ce, malgré l’aide financière accordée par les gouvernements. En 2003, c’est une nouvelle crise qui vient frapper de plein fouet une région du monde jusqu’alors relativement épargnée, soit l’Asie–Pacifique. Il s’agit évidemment du syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) qui affecta considérablement le trafic aérien dans cette région du monde et, dans une moindre mesure, au Canada, à la suite des cas recensés à Toronto. Ainsi, après un redressement en début d’année 2003, le trafic mondial accuse une diminution de 7,1 % en mars et de 17,4 % en avril, selon l’IATA (2003), les baisses les plus fortes étant observées en Asie–Pacifique (-36,3 %) et en Amérique du Nord (-22,4 %). Cela se traduit par une baisse du trafic de passagers de 7,1 % chez l’ensemble des membres de l’IATA pour le premier semestre de 2003 par rapport à l’année précédente (Archambault, 2003 : 4). Il aura fallu attendre le mois de juillet pour que ces pertes de trafic commencent à s’atténuer.

15Les plus récentes statistiques semblent indiquer la fin de ce tragique épisode. La région Asie–Pacifique a presque entièrement récupéré le terrain perdu lors de l’épisode du SRAS. En Europe, les principaux transporteurs aériens affichaient une assez bonne performance au troisième trimestre de 2003, alors qu’aux États-Unis, la performance financière des principaux transporteurs était plutôt encourageante pour la même période, avec un bénéfice d’exploitation moyen de 3,5 % par opposition à une perte de 7,2 % à la même période en 2002 (Airline Business, 2003 : 76-77). Au Canada, le transporteur dominant, Air Canada, tardait toujours à se libérer de la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers à la fin de 2003, après avoir déclaré un profit d’exploitation de 17 millions de dollars au troisième trimestre, en baisse par rapport aux 168 millions du même trimestre de 2002.

16Si le ciel semble s’éclaircir au-dessus de nos têtes, devons-nous nous attendre à un retour à la normale ? Ce serait sans compter sur les changements très profonds qui ont affecté le secteur et qui en amènent plusieurs à s’interroger sur la viabilité du modèle d’affaires traditionnel dans l’industrie du transport aérien.

Illustration 1 : L’enregistrement à l’aéroport international Pierre E. Trudeau de Montréal

Les inconvénients du transport aérien

Photo : Air Canada

De nouveaux phénomènes

Le comportement des voyageurs d’affaires

17Dans les manuels d’économie et de gestion du transport aérien, on divise traditionnellement le marché des voyageurs en deux segments : 1) les voyageurs d’affaires, forcés de se déplacer sans préavis, recherchant des fréquences élevées et des horaires flexibles et, par conséquent, disposés à payer le plein tarif (n’ayant pas le choix !) et 2) les voyageurs d’agrément, motivés par les loisirs ou les rencontres familiales, qui, eux, sont très sensibles aux prix. Pour attirer les voyageurs d’agrément à bord de leurs appareils et concurrencer les transporteurs nolisés, les transporteurs réguliers offrent traditionnellement toute une gamme de tarifs réduits, assortis de multiples conditions (comme une nuitée obligatoire le samedi, une durée de séjour minimale, aucun remboursement ni changement d’horaire, etc.), ce qui les rend inaccessibles aux voyageurs d’affaires qui requièrent de la flexibilité dans leurs horaires. En conséquence, ces derniers doivent souvent se résigner à payer le plein tarif, soit celui associé à une réservation de dernière minute. On comprend ainsi pourquoi les voyageurs d’affaires représentent la principale source de revenus des transporteurs réguliers nord-américains.

18Or, on assiste, depuis quelques années déjà, à un changement de paradigme concernant les voyageurs d’affaires. Malgré les privilèges qui leur sont parfois accordés (salons d’attente VIP, programmes pour voyageurs assidus, confort accru des sièges), les voyageurs d’affaires sont plutôt mécontents de leur sort. Plusieurs d’entre eux estiment en effet que le service obtenu n’est pas à la hauteur des tarifs élevés exigés par les compagnies aériennes régulières. Ils considèrent que voyager en avion est un mal nécessaire, que ce n’est plus considéré comme prestigieux, que ce n’est pas non plus très agréable, mais que c’est nécessaire pour maintenir de bons contacts personnels (Roy et Filiatrault, 1998 : 78). Ceux qui s’expriment ainsi sont des voyageurs d’affaires canadiens interviewés dans le cadre d’une étude approfondie sur l’impact des nouvelles pratiques d’affaires et des technologies de communication sur la demande de transport aérien. Ce sont également des clients assidus et privilégiés des transporteurs réguliers traditionnels comme Air Canada qui traverse présentement une période de turbulence sur le plan financier.

19Un autre sondage réalisé en 2002 auprès des voyageurs d’affaires aux États-Unis révèle que la situation ne s’est guère améliorée et que le sentiment de frustration est très élevé chez ce groupe de voyageurs (Business Travel Coalition–BTC, 2002 : 42). La même enquête révèle que les voyageurs d’affaires ont modifié leurs comportements en réservant leurs billets d’avion jusqu’à dix jours d’avance en moyenne afin de profiter des tarifs réduits. Soulignons que, historiquement, les voyageurs d’affaires accordaient deux fois plus d’importance à l’horaire de vol qu’au tarif dans leur choix d’un transporteur. Or, ce même sondage nous renseigne sur l’importance relative des différents critères de sélection d’un transporteur aérien. Les résultats, présentés au tableau 2, confirment l’importance accrue du prix des billets d’avion pour les voyages d’affaires (ibid. : 43).

Tableau 2 : Critères de sélection d’un transporteur

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Source : Business Travel Coalition—BTC, 2002

  • 1 Les répercussions sur l’ensemble des déplacements d’affaires par avion représentent un taux de subs (...)

20Les mieux nantis vont même jusqu’à abandonner la classe affaires des transporteurs réguliers, qu’ils associent à une forme de transport en commun, pour se tourner vers d’autres types de services comme le nolisement de jets privés. Ce type de service a d’ailleurs connu une croissance annuelle de l’ordre de 12 % depuis trois ans (Braham, 2001 : 121). D’autres vont tout simplement substituer des déplacements par d’autres moyens, notamment la vidéoconférence. Selon les résultats d’un sondage réalisé au Canada en 1997 auprès de 1 139 voyageurs d’affaires, les utilisateurs de vidéoconférence considèrent que celle-ci remplace un déplacement par avion dans 44,8 % des cas et il est même prévu que le taux de substitution global pourrait atteindre 8,6 % au début du vingt-et-unième siècle1 (Roy et Filiatrault, 1998 : 85-86). De plus, 78,3 % des répondants au sondage du BTC ont utilisé les technologies comme la vidéoconférence comme substitut à l’avion plus en 2001 comparativement à l’année précédente et 86 % avaient l’intention de le faire encore davantage en 2002 (Business Travel Coalition, 2002 : 42).

21Depuis les attentats du 11 septembre, certains voyageurs d’affaires craignent l’avion et préfèrent utiliser d’autres moyens de transport comme le train, l’autobus ou l’automobile, surtout sur les courts trajets. C’est ce que pensent 77 % des répondants au sondage du BTC qui rapportent que plus de voyageurs utilisent l’automobile sur de courtes distances, soit moins de 500 milles (Ibid. : 50).

22D’autres encore voyagent tout autant en avion, mais plus économiquement. Ainsi, pour profiter des tarifs réduits, les voyageurs d’affaires réservent maintenant en moyenne onze jours d’avance, aux États-Unis, et plusieurs se résignent à passer le week-end à l’extérieur de leur foyer, ce qui affecte leur vie familiale et n’améliore pas nécessairement leur degré de satisfaction par rapport aux déplacements en avion. Enfin, un nombre croissant de voyageurs d’affaires vont tout simplement opter pour les transporteurs à tarifs réduits.

Les transporteurs à tarifs réduits

23Le précurseur et modèle incontesté dans le domaine des transporteurs à tarifs réduits est le transporteur américain Southwest qui a réussi à attirer l’attention de l’industrie en étant le seul transporteur à déclarer des profits durant la difficile période de 1990 à 1993 et en célébrant l’an dernier sa trente et unième année consécutive de profitabilité.

24Son succès, Southwest le doit à l’application de quelques règles assez simples et à une culture d’entreprise axée sur la réduction des coûts. Tout d’abord, Southwest échappe à la domination de ses concurrents, les transporteurs réguliers traditionnels comme United Airlines et American Airlines, en évitant le plus possible leurs plaques tournantes. Il choisit plutôt des aéroports secondaires pour desservir les grandes agglomérations américaines : l’aéroport de Love Field plutôt que celui de Fort Worth à Dallas et celui de Midway plutôt que O’Hare à Chicago, par exemple. Southwest n’a pas besoin de systèmes informatisés de réservation complexes et coûteux car sa tarification est fort simple. En l’an 2000, cette compagnie a réalisé 30 % de ses revenus par le biais des ventes sur Internet. Southwest n’utilise qu’un seul type d’appareil, le Boeing 737, ce qui réduit ses coûts d’entretien. Il a choisi un segment de marché où le service à bord n’est pas le critère le plus important. En effet, Southwest se spécialise dans les trajets de courte distance, à tarifs réduits, à l’intérieur des États-Unis. Il offre des fréquences élevées entre les 58 villes desservies point à point, c’est-à-dire en évitant les fameuses plaques tournantes, sources de congestion et de coûts élevés. Son personnel est polyvalent et, contrairement à la croyance populaire, largement syndiqué.

25Un tel succès ne laisse pas indifférent. D’autres transporteurs américains comme JetBlue tentent de copier la formule gagnante de Southwest. Ces transporteurs à tarifs réduits réussissent à concurrencer les transporteurs réguliers grâce à leur structure de coût beaucoup plus faible comme en fait foi la figure 1. En Europe, des transporteurs à tarifs réduits comme EasyJet, Ryanair et Virgin Express voient le jour. Bien qu’ils ne connaissent pas tous le même succès que Southwest, ils occupent une part grandissante du marché. Au Canada, c’est surtout WestJet qui occupe ce segment du marché intérieur, mais de nouveaux transporteurs comme Jetsgo et Canjet se sont ajoutés en 2002. Dans l’ensemble du Canada, la part de marché des transporteurs à tarifs réduits (mesurée en sièges-kilomètres) est passée de 16 % en 2000 à 36 % en 2002 et on prévoit qu’elle franchira le cap des 50 % en 2004 (Ward, 2002 : 93).

Figure 1 : Coût/siège-km offert — Deuxième trimestre 2003 (transporteurs américains)

Les inconvénients du transport aérien

Source : Airline Business, 2003 : 101

26Il n’est donc pas étonnant qu’Air Canada ait cherché à stopper cette croissance en lançant, à son tour, son propre service à tarifs réduits (Tango) et une nouvelle filiale, également à tarifs réduits, dénommée Zip. Force est de constater néanmoins que ces initiatives n’ont pas permis à Air Canada de dégager des résultats financiers positifs. Il est relativement facile pour un transporteur traditionnel de cesser de servir des repas à bord, d’adopter un seul type d’appareils et de favoriser les réservations sur Internet, mais il est beaucoup plus difficile de changer sa culture organisationnelle pour la rendre conforme au modèle des transporteurs à tarifs réduits. Un peu partout dans le monde, des transporteurs réguliers traditionnels tentent également de faire obstacle à ces nouveaux venus en lançant leur propre filiale à tarifs réduits avec, cependant, des succès plutôt mitigés. On peut citer le cas de British Airways qui a abandonné sa filiale à tarifs réduits, dénommée Go, qui est passée depuis sous le giron du transporteur à tarifs réduits européen EasyJet.

27Pour mieux comprendre les difficultés auxquelles ces transporteurs font face, on peut proposer certaines conditions nécessaires pour la survie des transporteurs à tarifs réduits, lesquelles conditions étant largement inspirées du succès de Southwest et des écrits récents sur le sujet (Archambault et Roy, 2002) :

  • Offrir un service de qualité (de la valeur) au client pour son argent

  • Offrir des fréquences élevées

  • Accorder une importance particulière à la ponctualité et à la régularité du service

  • Offrir un service à bord correct, mais pas gratuit

  • Offrir un service différencié

  • Se concentrer sur les liaisons de courte distance, point à point

  • Choisir des aéroports secondaires pour desservir les grandes agglomérations

  • Éviter les plaques tournantes

  • Adopter une philosophie de réduction de coûts

  • Opter pour un seul type d’appareil (ex. Boeing 737)

  • Configurer ces appareils avec un maximum de sièges

  • Favoriser la sous-traitance

  • Accroître les ventes directes (service téléphonique, Internet)

  • Favoriser la polyvalence des employés et la recherche de productivité

  • Opter pour la simplicité

  • Adopter une tarification simple

  • Exploiter un réseau de service simple, point à point

28On peut comprendre que de telles conditions ne soient pas faciles à respecter pour les transporteurs réguliers traditionnels qui sont habitués à exploiter des réseaux en étoile mieux connus sous le vocable anglais de Hub-and-Spoke et qui excellent dans l’art de pratiquer une tarification complexe et dynamique basée sur l’évolution des ventes, à l’aide de systèmes informatisés de réservation. Mais le plus difficile pour elles consiste sans doute à adopter une philosophie de gestion et une culture d’entreprise qui soient compatibles avec celles adoptées par les Southwest, WestJet et EasyJet de ce monde !

29On a longtemps cru que les transporteurs à tarifs réduits ne visaient pas vraiment le marché des voyageurs d’affaires, mais attiraient plutôt des gens qui n’auraient pas voyagé autrement. Or, il semble de plus en plus évident que ce n’est pas le cas et qu’un segment croissant des voyageurs d’affaires soit devenu sensible aux prix, surtout sur des trajets relativement courts. En Europe, on estime à environ 40 % la proportion des voyageurs d’affaires sur les liaisons intérieures effectuées par les transporteurs à tarifs réduits (Airline Business, 2001). Ce pourcentage tombe à 20 % sur les liaisons internationales offertes par ces mêmes transporteurs.

30Même si les voyageurs d’affaires qui optent pour les transporteurs à tarifs réduits accordent, de toute évidence, une plus grande importance au tarif que leurs collègues qui choisissent les transporteurs réguliers traditionnels pour les mêmes destinations, une étude récente réalisée au Royaume-Uni tend à démontrer qu’ils sont tout aussi préoccupés par la ponctualité, la fréquence des vols et la flexibilité que leur accorde leur billet d’avion (Mason, 2001 : 108). Ils accordent cependant relativement moins d’importance au service à bord, aux programmes pour voyageurs assidus et aux salons privés dans les aéroports. Cette même étude constate que ces voyageurs d’affaires qui optent pour les transporteurs à tarifs réduits sont plus souvent à l’emploi d’entreprises de taille réduite. Cela s’expliquerait du fait que ces employés sont plus conscients de l’effet des frais de déplacement sur la profitabilité de leur entreprise et que les grandes entreprises sont davantage en mesure de négocier des rabais avec les transporteurs réguliers traditionnels.

Perspectives d’avenir

Perspectives pour l’industrie

31On peut avoir recours à une approche historique et prétendre que la crise que l’on traverse présentement sera oubliée dans quelques mois. On n’a qu’à se rappeler la dernière crise des années 1990 à 1992 alors que sévissaient à la fois la guerre du Golfe, une importante récession et une flambée des prix du pétrole. À l’époque, les transporteurs aériens avaient aussi perdu des milliards de dollars. Pourtant, la fin des années 1990 s’avérait bénéfique pour la plupart des transporteurs qui, croissance économique aidant, déclaraient alors d’importants profits. Dans une perspective historique, il ne faudrait donc pas céder à la panique puisque cette industrie a tendance à croître à long terme. Cela s’avère tout particulièrement dans le segment touristique qui pourrait redémarrer dès que les consommateurs seront rassurés quant aux mesures de sûreté dans les aéroports et dans les airs… en autant que les attentats terroristes et les épidémies se fassent de plus en plus rares évidemment.

32D’autres phénomènes se manifestent cependant. Toutes les mesures de contrôle mises en place dans les aéroports viennent alourdir davantage les processus d’embarquement et de débarquement des passagers, ajoutant ainsi aux délais et aux tracasseries associés aux voyages par avion. Or, on sait que les voyageurs d’affaires étaient déjà mécontents de leur sort et considéraient qu’il n’y avait plus rien d’agréable et encore moins de prestigieux à voyager par avion et ce, depuis plusieurs années déjà. On peut se demander dans quelle mesure ces tracasseries supplémentaires inciteront les voyageurs d’affaires et d’agrément à utiliser d’autres modes de transport et, dans le cas des voyageurs d’affaires, des substituts technologiques aux déplacements par avion, la vidéoconférence, par exemple. Comme on l’a vu à la section précédente, un autre phénomène à suivre est sans doute la croissance des transporteurs à tarifs réduits qui, certes, réussissent à stimuler la demande sur les marchés des courts trajets, mais qui remettent aussi en question le modèle d’affaires des transporteurs réguliers traditionnels.

Illustration 2 : Un Boeing 767

Les inconvénients du transport aérien

Photo : Air Canada

Perspectives pour Air Canada

33Au moment d’écrire ces lignes, l’avenir d’Air Canada demeure incertain. Depuis qu’elle s’est placée sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies, le 1er avril 2003, la société Air Canada a réussi à obtenir des concessions de ses employés pour environ 1,1 milliard de dollars, à convaincre ses créanciers de réduire le fardeau de sa dette et le loyer de ses avions. Cette dernière entente demeure très fragile après le retrait de Trinity Times Investment et est assujettie au règlement du litige opposant Air Canada à ses employés concernant le déficit de 1,5 milliard de leur régime de retraite et à d’autres conditions comme l’approbation des créanciers et des autorités chargées de l’application de la loi. De plus, ses pilotes sont mécontents de l’entente de principe concernant l’attribution des avions de 70 à 100 sièges entre Air Canada et de sa filiale régionale, Jazz. Enfin, pour réussir sa restructuration, la société devra également convaincre ses créanciers et les autorités compétentes du bien-fondé de son plan de redressement et de son plan d’affaires. Au moment d’aller sous presse, le scénario de faillite n’était toujours pas écarté.

34Il faut avouer cependant que la stratégie mise de l’avant par Air Canada a évolué de façon plutôt chaotique depuis deux ans. Stimulés par le succès des transporteurs à tarifs réduits, ses dirigeants ont tout d’abord voulu métamorphoser la compagnie aérienne en véritable « Wal-Mart » du ciel en lançant successivement le service à rabais Tango et la filiale Zip. Cette initiative s’est transformée en stratégie de segmentation à l’image de celle pratiquée par la chaîne d’hôtels Marriott, avec l’ajout de nouvelles filiales comme Jazz et Jetz. Mais la réalité est venue rappeler aux gestionnaires d’Air Canada qu’on peut difficilement transformer un transporteur régulier traditionnel en Wal-Mart et encore moins en une multitude d’unités d’affaires qui engendrent plus de confusion que de réconfort chez le public voyageur. Le service Tango a maintenant cédé sa place aux tarifs Tango, c’est-à-dire que l’expérience « Tango » est terminée et que l’on mise dorénavant sur Zip pour concurrencer les transporteurs à tarifs réduits de plus en plus actifs au Canada. Par ailleurs, le président d’Air Canada, M. Milton, concède maintenant une partie du marché intérieur canadien à ses concurrents. En effet, il déclarait récemment, dans une entrevue au magazine Airline Business, qu’il ne se souciait guère du marché intérieur canadien car il s’agit d’un marché mature et qu’il ne prévoyait pas de croissance, pour Air Canada, dans ce marché (Knibb, 2003 : 61). Il s’agit d’un virage plutôt spectaculaire pour une compagnie aérienne qui possédait environ 80 % du marché canadien au lendemain de son acquisition de Canadien International en l’an 2000 et qui attribuait à Tango et à Zip le bref redressement de sa situation financière observé en 2002.

35Dans l’éventualité où Air Canada réussirait sa restructuration, c’est davantage vers les États-Unis et les autres destinations internationales que s’articulera sa stratégie de croissance, compte tenu des possibilités offertes par ces marchés et de la très bonne réputation de service que s’est taillée Air Canada au fil des ans et ce, malgré les quelques écueils des dernières années. Mais, pour ce faire, la société aérienne devra réussir à motiver ses employés, malgré les concessions forcées, afin de conjuguer productivité et service à la clientèle. Il est probable en effet que ces concessions soient vite ramenées sur la table le jour où le transporteur renouera à nouveau avec la profitabilité.

Conclusion

36Les attentats terroristes du 11 septembre ont secoué le monde entier et propagé une onde de choc qui a lourdement atteint toute l’industrie du transport aérien. D’autres malheureux événements se sont succédés depuis pour maintenir cette industrie en pleine période d’incertitude. Nous avons passé en revue certains facteurs de risque qui ont influencé le secteur du transport aérien depuis trois ans. Nous avons tout d’abord examiné quelques tendances historiques qui se manifestaient déjà avant l’éclosion de la récente crise.

37Nous avons par ailleurs évalué les conséquences immédiates et à moyen terme des événements récents comme les attentats du 11 septembre et la crise du SRAS. Nous avons également expliqué l’importance de phénomènes nouveaux comme la concurrence des transporteurs à tarifs réduits et les changements de comportements des voyageurs d’affaires. En terminant, nous avons examiné les perspectives d’avenir de ce secteur névralgique pour l’industrie du tourisme mondial.

38Au Canada, le sort qui attend Air Canada demeure incertain. Néanmoins les voyageurs seront assurés de trouver un transporteur aérien pour les amener vers les destinations de leur choix à l’avenir. Et cet avenir en est un de croissance pour cette industrie, car on prévoit toujours que la demande pour les services de transport aérien sera supérieure à la croissance économique durant les prochaines années et ce, surtout pour les liaisons internationales. Certes, le taux de croissance tend à diminuer de décennie en décennie, mais la volonté de voyager des civilisations — surtout sur le continent asiatique — ainsi que le phénomène de mondialisation auront tôt fait de nous faire oublier la morosité du marché actuel… jusqu’à la prochaine décennie !

Quels sont les avantages et les inconvénients du transport aérien ?

Les avantages du transport aérien.
Le plus rapide pour les envois internationaux..
Une meilleure couverture géographique..
Un indice très bas en termes de sinistre..
Plus de sécurité lors de l'envoi des articles de grande valeur économique..
Processus plus simples en comparaison avec le transport maritime..

Quels sont les inconvénients du transport ?

Les points faibles du transport routier Le coût du transport est relativement cher pour les longues distances. Le transport routier est fait pour transporter des denrées périssables qui nécessitent une livraison rapide. Les risques de la route ( accidents, insécurité sur le trajet,…)

Quels sont les inconvénients du transport ferroviaire ?

Les chargements et déchargements intermédiaires impliquent un coût plus important, une augmentation de l'usure et une grande perte de temps. Le principal inconvénient du transport ferroviaire est l'insuffisance des infrastructures. Cependant, le nombre limité de lieux de livraison accroît également cet inconvénient.

Quels sont les inconvénients du transport maritime ?

Les inconvénients du transport maritime Très lent ce qui empêche parfois de respecter les délais de livraison. Difficile de surveiller l'emplacement exact des marchandises en transit. Douanes et accises. Nécessite le transport intérieur de porte-à-porte.